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chronique du 7 mars 2008
 

La Via Dolorosa

La Via Dolorosa, littéralement la « Voie douloureuse », est le chemin qu'aurait parcouru Jésus chargé de sa croix jusqu'au lieu de son supplice. Les étapes de ce « chemin de croix » sont commémorées au cours de quatorze stations indiquées par la présence d'une petite chapelle ou simplement par une inscription sur le mur et s'échelonnent tout au long d'un parcours qui sillonne les rues et ruelles de la vieille ville de Jérusalem et qui se termine au Saint-Sépulcre, abritant le site traditionnel de la mort et résurrection du Christ.
 

station III

Plusieurs processions ont lieu sur Via Dolorosa, qui traverse un des souks de la vieille ville. Ici la procession vint de passer devant la station III (à gauche) où Jésus chute pour la première fois.
(photo : C. Boyer)

     La Via Dolorosa commémore la Passion du Christ, mais il ne faudrait pas y voir le trajet réel parcouru par Jésus. D'abord Jésus n'a évidemment jamais foulé les rues de la vieille ville de Jérusalem que l'on peut visiter aujourd'hui; les rues de l'époque de Jésus sont à trois ou quatre mètres sous le niveau du sol actuel. Il ne faut pas oublier que Jérusalem a été détruite et reconstruite à plusieurs reprises; l'accumulation successive de décombres a occasionné une surélévation du niveau du sol de la ville.

     Ensuite, la Via Dolorosa trouve son origine dans les pèlerinages chrétiens en terre sainte rendus possible à l'époque de Constantin, soit trois cent ans après l'époque de Jésus. Et ce ne sont évidemment pas des considérations d'ordre historique qui ont dicté le tracé, qui a d'ailleurs subi plusieurs modifications au cours des siècles; à une époque il y eut même différentes Via Dolorosa se faisant concurrence. On doit aux franciscains les grandes lignes du chemin de croix actuel, qui date du XIVe siècle et qui ne comportait que huit stations; les autres sont apparues plus tard, au XVIIIe siècle, sous l'influence des chemins de croix européens qui en comportaient quatorze... et leur emplacement définitif ne fut fixé qu'au XIXe siècle.

     Enfin, même la direction générale de la Via Dolorosa n'est pas assurée. Si le point d'arrivée (le site du Saint-Sépulcre) est vraisemblable, le point de départ (le site de la forteresse Antonia) l'est moins. La résidence du gouverneur, le « prétoire », d'où Jésus est emmené pour être crucifié (Mt 27,27 par.), et dont Jean (19,13) nous informe du nom hébraïque, Gabbatha (« lieu surélevé »), ne correspond probablement pas à l'Antonia mais plutôt à l'ancien palais d'Hérode (la « Citadelle »), situé à l'autre bout de la vieille ville, qu'il domine, près de l'actuelle porte de Jaffa.
 

station VII

Les quatorze stations de la Via Dolorosa sont autant de haltes
au cours desquelles les pèlerins méditent sur les souffrances du Christ.
Ici la station VII, deuxième chute de Jésus.
(photo : C. Boyer)

     La Via Dolorosa débute près de la porte des Lions, appelée aussi Saint-Étienne, qui donne accès à la vieille ville de Jérusalem par la façade Est de la muraille. L'emplacement de la condamnation à mort de Jésus (station 1) et le lieu où il aurait été chargé de sa croix (station 2) sont situés à proximité de l'arche de l'Ecce Homo, une arche dont une moitié est visible de la rue et qui tire son nom latin de la formule que Pilate prononce dans l'évangile de Jean en présentant Jésus à la foule: «voici l'homme» (Jn 19,5). À l'époque de Jésus, la forteresse Antonia s'élevait à cet endroit, d'où les soldats pouvaient surveiller ce qui se passait sur la grande esplanade du temple. Et c'est dans cette forteresse que la tradition chrétienne a situé, à tort probablement, le prétoire foulé par Jésus et Pilate.

     L'arche de l'Ecce Homo n'existait pas encore à l'époque de Jésus. L'arche est le reliquat d'une porte triomphale qui a été érigée par l'empereur Hadrien après la victoire sur la révolte juive de 132-135, et dans laquelle, au XIIIe siècle, deux dalles du pavement (lithostroton) de la forteresse Antonia ont été encastrées pour faciliter aux pèlerins la vénération de ce qui était identifié comme le lieu du prétoire; ça a occasionné une confusion, car c'est tout l'arche qui fut alors appelé Ecce Homo. Aucune chance, donc, que Jésus ait été présenté par Pilate à la foule à partir de cet arche.
 

crevaison

Des enfants arabes passent devant la cinquième station de la Via Dolorosa :
Simon de Cyrène se chargeant de la croix de Jésus. Une légende fait du renfoncement
dans le mur (à droite sur la photo) la trace de la main de Jésus...
(photo : C. Boyer)

     À environ cinq cent mètres de là, Jésus fait une première chute (station 3) et un peu plus loin il rencontre sa mère (station 4). Il s'agit là de stations qui n'ont aucun ancrage dans les évangiles. Ce n'est pas le cas de la suivante, qui commémore la réquisition de Simon de Cyrène (station 5), une donnée évangélique (Mt 27,32 par.) qui a toute les chances d'être historique. Non seulement Marc mentionne deux fils de Simon de Cyrène sans plus de précision, comme s'ils étaient connus de la communauté pour laquelle il écrit (Mc 15,21), mais surtout, puisque la consigne de « porter sa croix » qu'on retrouve sur les lèvres même de Jésus (Mt 10,38; 16,24) a visiblement été tenue pour importante pour les premiers chrétiens, on les imagine difficilement inventer que Jésus n'ait pas porté lui-même sa croix. Pourtant, à la lecture des synoptiques, dès qu'on fait sortir Jésus pour être crucifié, un certain Simon de Cyrène qui passait par là est réquisitionné pour porter sa croix — après les tortures que Jésus a subies (Mt 27,26-31 par.), l'épisode n'est pas invraisemblable. L'évangéliste Jean, peut-être embarrassé par la contradiction, ne mentionne jamais Simon de Cyrène et affirme même que « Jésus porta lui-même sa croix » (Jn 19,17).
 

attaque ciblée

Les cinq dernières stations de la Via Dolorosa se trouvent à l'intérieur du Saint-Sépulcre.
Ici la treizième station, l'avant-dernière, au lieu où Jésus aurait été étendu par terre
après avoir été descendu de la croix.
(photo : C. Boyer)

     La rencontre avec Véronique qui éponge le visage de Jésus (station 6) est une légende qui n'a pas plus de fondement dans la Bible que les deuxième et troisième chutes de Jésus (stations 7 et 9). Par contre, la consolation des femmes de Jérusalem (station 8) est inspirée d'un épisode biblique (Lc 23,27-31), comme le sont aussi les cinq dernières stations, qui sont situées à l'intérieur du Saint-Sépulcre, et qui commémorent les derniers moments de la Passion (Mt 27,33s par.): le partage des vêtements (station 10), la crucifixion (station 11), la mort de Jésus (station 12), la descente de la croix (station 13), ainsi que la mise au tombeau et la résurrection (station 14).

     Le Saint-Sépulcre est situé à l'emplacement probable de la colline du Golgotha (Mc 15,22) et d'une carrière ayant servi de tombes dans l'Antiquité (Mc 15,46). On peut d'ailleurs encore voir une section de l'éperon rocheux à l'étage ainsi que de vieilles tombes dans l'annexe d'une chapelle derrière le cénotaphe de l'Anastasis. À l'époque de Jésus, le site du Saint-Sépulcre était situé hors des murs de la ville; si ce n'est plus le cas, c'est tout simplement parce que les limites actuelles de la vieille ville de Jérusalem ne correspondent pas à celles de la ville au temps de Jésus.
 

station XII

À l'étage du Saint-Sépulcre, la station XII.
Cette vitre protège ce qui reste d'un monticule rocheux qui pourrait bien être le Golgotha.
(photo : C. Boyer)

Chrystian Boyer

Lire aussi :
Le Saint-Sépulcre (série de 8 articles)

Article précédent :
Hébron, la ville d'Abraham

 

 

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