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22e dimanche ordinaire B - 3 septembre 2006

 

De Dieu et des hommes

Le pur et l'impur Marc 7, 1-8.14-15.21-23
Autres lectures : Deutéronome 4, 1-2.6-8; Psaume 14 (15); Jacques 1, 17-18.21b-22.27


Épineuse question, que celle de demander ce qui, dans toute religion, vient vraiment de Dieu et ce qui est ajouté par l’homme. Délicate tâche, que de désencombrer le cœur de la foi des multiples exigences transmises par la tradition. Car toute tradition – si vénérable soit-elle – a tendance à grossir au fil du temps. Les fidèles qui arrivent plus tard reçoivent en héritage le trésor de la foi des générations précédentes, avec toutes les relectures, les interprétations divergentes et les adaptations diverses ayant été requises par d’autres temps et d’autres lieux. Après deux mille ans de christianisme, le précieux dépôt de la foi pèse plutôt lourd sur les épaules des jeunes générations.

La multiplication des exigences
    Déjà Jésus s’insurgeait – selon Marc – contre la multiplication indue des exigences de pureté rituelle qui alourdissaient le quotidien des paysans juifs de son temps. Bien comprises, ces traditions avaient pour but de rappeler à la conscience de tout enfant d’Israël le privilège de l’Alliance, et l’appel à mener une vie sainte dans un monde qui souvent ne l’est pas. Mais à force de multiplier les rappels par des prescriptions et des interdits, la sainteté était devenue le privilège des gens bien nantis, ayant plus de temps de loisir que la moyenne des paysans pour mener une vie pieuse. Jésus n’y va pas par quatre chemins : ce ne sont que traditions humaines, dit-il. Pire : elles font obstacle à l’observance de la volonté de Dieu, soutient-il. La forêt cache l’arbre, dit-on. C’est ainsi que trop de préceptes et d’interdits, même bien intentionnés, font oublier l’essentiel et finissent par écraser les pauvres gens, qui ne s’y retrouvent plus. Surtout, ces traditions transforment la religion en une tyrannie, alors qu’elle devrait être un chemin de libération, d’épanouissement et de grâce.

     Il n’y a pas si longtemps au Québec, le christianisme serrait les fidèles à la gorge. Commandements, préceptes, jeûnes, interdits, messes, chapelets, dévotions, neuvaines, confessions et retraites ponctuaient le quotidien des gens d’ici. Jusqu’à ce que le vase déborde et que beaucoup claquent la porte de l’Église. Aujourd’hui, nous vivons encore marqués par cet héritage, qui fait rugir les révoltés, qui fait fuir la jeunesse, ou – pire – qui nous rend insignifiants pour la quête spirituelle de nos contemporains.

Un discernement nécessaire
    Face à la crise actuelle, certains voudraient durcir le ton, blâmer le monde pour son impiété, puis serrer les rangs autour des quelques fidèles irréductibles, en espérant que les malheurs de notre temps finissent par ramener les brebis égarées au bercail, en quête de vérité. Ils espèrent peut-être en vain, car il y a des tournants dans la vie et dans l’histoire de l’Église et du monde qui ne permettent pas de revenir en arrière. L’histoire, même sainte, va de l’avant avec ou sans nous.

    D’autres ont pris leurs distances vis-à-vis de l’institution. Ils ne trouvent pas d’intérêt à s’en approcher sur une base régulière. Surtout, pas question de s’engager auprès d’elle, même s’ils demeurent des croyants dans leur for intérieur et qu’ils se rendent à l’église à certains moments clefs de leur vie. Sorte de protestants silencieux, ils attendent dehors un changement de ton à l’intérieur, qui tarde à venir. Ils pourraient attendre longtemps, car en sortant, ils ont laissé toute la place à ceux qui ne voudraient rien changer.

    Un dernier groupe est tellement choqué par l’inhumanité de la tradition, qu’ils ne voient plus Dieu du tout au sein de l’Église. De toutes leurs forces et leurs capacités, ils dénoncent, ils attaquent et ils discréditent l’institution, disant comme le Jésus de l’évangile : ce n’est que la tradition des hommes, Dieu n’a rien à voir là-dedans. Rendus allergiques et méfiants vis-à-vis de toute religion organisée, ils privilégient soit l’humanisme séculier, comme correctif à tant de bêtise religieuse, soit l’ésotérisme, comme si la vraie Parole de Dieu avait été mise de côté, mal interprétée, enfouie, et sa vérité préservée et transmise à travers une tradition alternative. Ces gens-là ne posent plus un regard juste sur la diversité vécue au sein même de l’Église. Pour eux, tout y est du pareil au même. Ils n’y voient rien de bon et ils jettent volontiers le bébé avec l’eau du bain : le commandement de Dieu et la tradition des hommes!

    Est-il trop utopique de souhaiter un sain discernement? Pouvons-nous ouvrir les yeux et regarder avec sérénité et lucidité l’héritage que nous ont laissé les générations précédentes? Certaines choses appartiennent à une autre époque, à une autre culture, à une sensibilité religieuse qui n’est plus la nôtre. Par contre, au cœur même de ce dépôt de la foi se trouve une Parole salutaire et inusité pour notre temps. Saurons-nous trouver la perle de l’Évangile?

Une tradition vivante
Deutéronome 4, 1-2.6-8
     L’extrait du livre du Deutéronome précise qu’il ne faut rien ajouter ni rien enlever à la Loi du Seigneur, mais qu’il faut plutôt garder les commandements divins tels que prescris. Aussi louable soit-il, ce souci d’exactitude est difficile à respecter à la lettre. D’abord, parce que la Parole de Dieu n’existe pas en dehors des témoignages humains, qui sont rarement concordants au mot près. Ensuite, parce que Dieu continue de parler et de réviser lui-même ses recommandations en fonction des époques et des lieux. Le livre du Deutéronome, comme son nom même l’indique (Deuxième Loi) est une révision de la Loi contenue dans le livre de l’Exode! Le souci de coller à la volonté de Dieu s’exprime donc justement par des révisions constantes de la tradition écrite. Aucun texte ne saurait emprisonner Dieu.

La volonté divine
Jacques 1, 17-18.21b-22.27
    À sa façon, la Lettre de saint Jacques essaie de cerner le cœur de la volonté divine. Ce qui compte finalement, c’est d’aimer par des gestes concrets. Le reste, ce sont des traditions tout humaines, n’est-ce pas?

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2064. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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