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28e dimanche ordinaire B - 15 octobre 2006

 

À quelle enseigne se loge notre fierté?

L'appel du riche Marc 10, 17-30
Autres lectures : Sagesse 7, 7-11; Psaume 89(90); Hébreux 4, 12-13


La question de l’homme riche traduit à sa façon la quête spirituelle de l’humanité. Bon Maître, que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle? (Marc 10,17). Immortalité, dépassement des limites de la condition humaine, aspiration aux privilèges de la divinité, sortie définitive du perpétuel cycle de la nature, bris radical de la banalité du quotidien… l’humanité a soif d’une vie autre que celle qu’il nous est donné de vivre. Les humains sont ces drôles d’animaux qui veulent devenir autres et plus que leur simple bagage génétique. Ce désir est incrusté au plus profond de notre âme, comme une cicatrice ineffaçable de la rencontre originelle avec Dieu. L’important passage de l’Évangile de ce dimanche aborde une inquiétude universelle.

Un homme et ses richesses
    L’homme qui questionne Jésus à ce sujet est un Juif pieux qui réussit assez bien dans la vie. Dans la version de Matthieu (19,16-22), il s’agit d’un jeune homme; dans celle de Luc (18, 18-23), c’est un chef ou un notable. La version de Marc ne le précise pas : il s’agit de « quelqu’un » qui, comme nous, est à la recherche du vrai bonheur. C’est seulement vers la fin du récit que nous apprenons son aisance financière. C’est dire que la question qu’il porte, c’est notre question à nous tous, peu importe notre situation économique ou notre condition sociale.

     Avant d’être riche de son avoir, l’homme qui questionne Jésus est riche de son savoir. S’il appelle Jésus Bon Maître, c’est qu’il perçoit le Christ d’abord et avant tout comme un savant, comme un enseignant auprès duquel il pourrait apprendre davantage. L’homme en question connaît les commandements transmis par la Loi de Moïse, mais il demeure insatisfait. Il voudrait en savoir plus. Sans doute se considère-t-il comme un « Bon Disciple »…

L'homme riche et son inquiétude
    L’homme qui questionne Jésus est ensuite riche de son devoir accompli. En effet, il se vante d’avoir observé tous les commandements depuis sa jeunesse. Cet homme, il est « bon » d’après les standards de la Loi juive. Cela veut dire qu’il ne s’est pas enrichi de façon malhonnête; il doit sa fortune à son effort personnel ou à une bonne étoile. Il dit avoir toujours fait ce qu’il devait. Peut-être considère-t-il que son succès soit la juste récompense de Dieu pour sa bonté? Pourtant, il demeure inquiet de son sort. Il voudrait se rassurer en faisant approuver sa conduite par un maître comme Jésus. Déjà au point de départ, Jésus ne se fait pas très rassurant lorsqu’il réserve le qualificatif de « bon » à Dieu seul. Personne n’est « bon » devant Dieu! Cela élimine le droit humain à la récompense et ouvre la porte à la grâce souveraine de Dieu. L’homme pieux n’a qu’à bien se tenir…

    Jésus ne condamne pas l’homme riche. Il ne fait que répondre à son inquiétude avec audace et sagesse à la fois. Marc nous dit même que Jésus éprouve une certaine tendresse à son égard, peut-être à cause de sa naïveté. On ne marchande pas son salut auprès de Dieu à coup de bonnes œuvres…! Jésus reflète à l’homme pieux ce qui lui manque : la confiance et l’abandon à la bonté de Dieu. Une seule chose te manque : va, vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres et tu auras un trésor dans le ciel; puis viens et suis-moi (Marc 10,21). En d’autres mots : arrête de t’appuyer uniquement sur ton savoir, sur ton devoir, sur ton avoir; fais confiance au pouvoir du Bon Dieu.

L'homme riche et sa pauvreté
    C’est à ce moment que l’homme riche et pieux révèle sa pauvreté et son manque de foi. Il ne veut pas suivre Jésus parce qu’il ne croit pas en ce que Dieu peut faire pour lui gratuitement. Il se retire assombri et triste, car il avait de grands biens (Marc 10,22). Ce n’est pas à tout le monde que Jésus adresse l’invitation de le suivre de proche. L’homme en question a manqué l’occasion de se joindre aux apôtres! Serait-ce par égoïsme, ou encore par matérialisme? Ce serait étonnant, compte tenu de sa quête spirituelle. L’homme riche n’a pas manqué de charité. S’il respectait les commandements et autres préceptes de piété juive, il devait sûrement faire l’aumône généreusement. L’homme riche et pieux a eu peur de se départir à la fois de son savoir, de son devoir et de son avoir. Il tenait absolument à son statut et à son pouvoir d’homme juste en Israël, par lesquels il aurait dû obtenir la vie éternelle. Il ne voulait pas du nouvel Israël de Jésus, où les derniers seraient premiers par la grâce souveraine du Bon Dieu.

L'abandon de la foi
    Le défi de suivre le Christ n’est pas simplement de choisir le bien plutôt que le mal. Le défi de devenir un authentique disciple de Jésus est de rejeter l’injustice de ce monde qui se croit juste et de croire dans un nouvel ordre où les besoins humains sont comblés bien au-delà de la question du mérite personnel. Cela implique le détachement et l’humilité de celui ou de celle qui croit en un Dieu « Bon » pour tous, en toute circonstance. À la vieille inquiétude de l’humanité quant à son sort ultime, Jésus répond par un abandon total à la miséricorde du Créateur. Et cet abandon est déjà une libération de l’esclavage de nos richesses : du savoir, du devoir, du pouvoir et de l’avoir terrestres. Cet abandon est un véritable don de la foi; et il est à notre portée. La foi n’attend que notre bon vouloir pour nous sauver de nous-mêmes, de notre indomptable fierté d’hommes riches et pieux.

La sagesse libératrice (Sagesse 7, 7-11)
    Comme il fallait s’y attendre, le livre de la Sagesse vente les mérites de l’intelligence. La sagesse préférée aux trônes et aux sceptres (7,8) n’est pas somme toute un savoir, comme celui de l’homme riche et pieux de l’évangile. La sagesse est une attitude de la volonté, qui préfère ce qui fait grandir la liberté de la personne à ce qui la rend esclave des éléments du monde. Si l’homme riche de l’évangile avait été sage, il se serait détaché de son savoir, de son devoir, de son avoir et de son pouvoir et il aurait suivi Jésus, confiant dans la miséricorde de Dieu.

La Parole à double tranchant (Hébreux 4, 12-13)
     Ce passage de la Lettre aux Hébreux offre une merveilleuse piste de discernement de ce qui est véritablement Parole de Dieu dans nos vies. Est Parole divine celle qui pénètre au plus profond de l’âme (4,12), celle qui dévoile les pensées du cœur (4,12) et celle qui met au grand jour nos choix de vie en nous dévoilant nos peurs et nos richesses.

Source: Le Feuillet biblique, no 2070. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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