Miryam. Gertrude Crête, 2000. Encre acrylique, 30,5 x 24 cm.
Société expo-bible du Québec (image © SEBQ).
La danse et le tambourin
Sylvain Campeau | 16 décembre 2024
La danse est souvent mentionnée dans la bible hébraïque. Elle entraine joyeusement hommes et femmes lors de moments importants de l’histoire d’Israël. La danse est souvent une manifestation qui exprime la louange de YHWH, le Dieu d’Israël.
Miryam et Judith
Quand on parcourt les premiers livres de la bible, l’une des premières manifestations où la danse vient célébrer la puissance de Dieu éclate après le miracle de la mer. Elle est initiée par Miryam qui danse au son du tambourin. « La prophétesse Miryam, sœur d’Aaron, prit en main le tambourin ; toutes les femmes sortirent à sa suite, dansant et jouant du tambourin. » (Exode 15,20) Cette danse survient après la proclamation de ce que l’on appelle le cantique de Moïse (Exode 15,2-6.10a.11.17), un texte poétique qui est repris à chaque veillée pascale après la lecture du passage de la mer Rouge. Ce texte raconte l’intervention de Dieu qui vient mettre un terme à la menace égyptienne alors que le peuple hébreu était en fuite.
Le Seigneur suscite au milieu de son peuple des hommes et même des femmes pour le protéger. C’est le cas de Judith, une héroïne dont le récit est raconté dans le livre du même nom. Avec ruse et audace, elle écarte la menace d’une invasion babylonienne en décapitant Holopherne, le général de l’armée ennemie. En constatant la mort de leur chef, les troupes ennemies se dispersent sans même livrer bataille. Au dernier chapitre du livre, la joie éclate dans le camp hébreu :
Judith dit : « Entonnez un cantique pour mon Dieu avec des tambourins, chantez le Seigneur sur les cymbales, composez pour lui un psaume de louange, exaltez et invoquez son nom. Car c’est un Dieu qui brise les guerres que le Seigneur. (16,1-2)
David
Dans le Deuxième livre de Samuel, le transfert de l’arche d’alliance de Quiryath-Yéarim vers Jérusalem est présenté comme une véritable procession [1]. L’arche est un symbole fort de la foi hébraïque à cette époque. Le coffre sacré représente la présence de Dieu au milieu de son peuple. Tous les membres du cortège sont saisis par cette présence et le roi se laisse emporter dans une danse enivrante. Le roi David « s’ébattait devant le Seigneur » au son des instruments, dont le tambourin (2 Samuel 6,5). Légèrement vêtu, « David tournoyait de toutes ses forces devant le Seigneur » (6,14a).
La finale du récit est intéressante. Quand David entre dans sa maison, l’épouse du roi lui reproche son comportement disgracieux, pendant la procession, pour un homme de son rang. Deux visions du sacré s’affrontent dans ce récit. Mikal incarne la vision d’une religion austère qui exige une manière rigide et codifiée de se comporter. Au contraire, le comportement exubérant de David traduit une grande liberté qui est l’un des fruits d’une foi authentique [2]. Ce récit peut donc être compris comme une invitation à faire preuve d’audace et à ne pas s’enfermer dans des règles strictes et une manière de vivre la foi chrétienne qui nous vient de l’extérieur. Il ne s’agit pas ici de rejeter ce qui nous vient de la tradition mais de s’engager sur un chemin de vie spirituelle où l’Esprit peut nous interpeller à vivre selon la liberté des enfants de Dieu.
Diplômé en études bibliques (Université de Montréal), Sylvain Campeau est responsable de la rédaction.
[1] Ce récit de l’installation de l’arche dans la cité de David est à comprendre en lien avec le psaume 132. Le fait que ce psaume reprenne ce récit du transfert de l’arche indique que cette procession devint une institution qui fut répétée dans l’ancien Israël. Ce parallèle a été proposé par l’exégète allemand Sigmund Mowinckel, The Psalms in Israel Worship, Vol. I, New York, 1967, p. 174-175.
[2] Un article d’Antoine Nouis explique bien cette opposition soulignée dans les commentaires de ce passage. Voir l’article de la série Le règne de David : « 1. L’arche de l’alliance et le temple de Jérusalem » (Réforme.net).
