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chronique du 19 mai 2000

 

Pourquoi Dieu est-il appelé « Roi »?

QuestionJe lis souvent des textes où il est dit que Dieu est roi. Je trouve cela plus ou moins inspirant. Mais, au fait, en quel sens peut-on dire que «  Dieu est roi »? D'où vient cette appellation? (G.-R. Robert)

RéponseJe suis le Grand Roi, dit le Seigneur de l'univers. Ce texte, que nous retrouvons au verset 14 du premier chapitre du livre de Malachie, nous donne l'occasion de nous interroger sur le sens du mot « roi » appliqué à Yahvé.

Dieu à l'image du roi

     Le rapprochement entre la divinité et la royauté devait se faire en quelque sorte naturellement. Il était normal que les humains se représentent leur dieu à l'image de celui qui exerçait, dans leur société, le pouvoir le plus étendu. Comme les rois de la terre, le roi-dieu siège sur un trône, il habite un palais, il s'entoure d'une cour, il possède des serviteurs et une armée.

     Cette imagerie, nous la retrouvons, avec de légères variantes, dans presque toutes les religions de l'ancien Orient. Celle sur laquelle nous sommes le mieux renseignés est sans doute la religion de Babylone. Au début de chaque année était célébrée une fête de « l'intronisation royale de Marduk ». En réaffirmant régulièrement la souveraineté universelle de leur dieu, les Babyloniens voulaient assurer l'ordre du monde: tant que Marduk exerce sa royauté, la nature sera favorable; la récolte, abondante; le roi sera victorieux et les ennemis seront soumis.

     Il n'est pas impossible qu'une fête semblable ait existé en Israël, en l'honneur de Yahvé, à certaines époques. Elle n'a cependant jamais été reçue dans la liturgie officielle et elle ne figure dans aucun des calendriers festifs qui nous sont parvenus. Il est probable, en effet, que les responsables religieux d'Israël aient eu peur, en acceptant cette fête, de favoriser l'assimilation entre Yahvé et les autres dieux, rois des civilisations voisines.

Yahvé est Roi

     Dans l'Ancien Testament, contrairement à ce qu'on pourrait croire, les attestations de la formule « Yahvé est roi » ou d'autres équivalentes sont relativement tardives.

     De l'époque d'avant l'exil -- alors qu'il y avait encore des rois en fonction -- nous trouvons un texte dans le livre d'Ésaïe (6,5) qui met surtout en valeur l'aspect majestueux de Dieu, sa puissance et sa sainteté. L'expérience de la monarchie ne fut pas toujours heureuse, aussi bien dans le royaume de Juda que dans celui d'Israël, si bien que beaucoup crurent que l'institution royale en tant que telle était une erreur parce que le seul vrai roi d'Israël, c'est Yahvé ( 1 S 8,7; 12,12; voir Jdt 8,23).

     Mais c'est surtout pendant et après l'exil à Babylone (c. 587-538), alors que le peuple n'a plus de roi et est soumis politiquement à une puissance étrangère, que se développe la théologie de la royauté divine. (Notons qu'après l'épreuve de l'exil, la foi en Yahvé paraît beaucoup mieux assurée et le risque de contamination par les religions étrangères, même s'il existe toujours, devient moins important).

Ce qu'est la souveraineté de Yahvé

     L'accent est mis alors sur différents aspects de la souveraineté de Yahvé sans qu'on puisse vraiment parler d'une évolution d'un thème à l'autre. Yahvé est le roi d'Israël : « Yahvé nous juge et Yahvé nous régente, Yahvé est notre roi, c'est lui notre sauveur. » (Es 33,22) « Par ma vie! oracle du Seigneur Yahvé, je le jure : c'est moi qui régnerai sur vous. » (Ez 20,33)

     Chaque membre du peuple est sujet de Yahvé: « C'est toi, mon roi, mon Dieu, qui décidais les victoires de Jacob. » (Ps 44,5) « On a vu tes processions, ô Dieu, les processions de mon Dieu, de mon roi, au sanctuaire. » (Ps 68,25)

     Yahvé règne à Jérusalem sur le mont Sion. « Yahvé Sabaot est roi sur la montagne de Sion et à Jérusalem . . . » (Es 24,23) « Alors Yahvé régnera sur eux à la montagne de Sion, dès maintenant et à jamais. » (Mi 4,7)

     Yahvé est aussi le roi universel, il domine la nature : « Alors Yahvé sera roi sur toute la terre. » (Za 14,9) « C'est le roi de toute la terre : sonnez pour Dieu, qu'on l'apprenne! » (Ps 47,8)

     La souveraineté de Yahvé s'étend aux autres peuples: « Joie au ciel! exulte la terre! Dites chez les païens : " C'est Yahvé qui règne! " » (1 Ch 16, 31) « Dieu, il règne sur les païens, Dieu siège sur son trône de sainteté. » (Ps 47,9)

     La royauté de Yahvé est éternelle: « Yahvé régnera pour toujours et à jamais. » (Ex 15,18) « Je t'exalte, ô roi mon Dieu, je bénis ton nom toujours et à jamais... Ton règne, un règne pour tous les siècles, ton empire, pour les âges des âges! » (Ps 145,1.13)

     En tant que roi d'Israël, Dieu intervient pour sauver son peuple: « Ainsi parle Yahvé, roi d'lsraël, Yahvé Sabaot, son rédempteur... » (Es 44,6) « Yahvé a levé la sentence qui pesait sur toi; il a détourné ton ennemi. Yahvé est roi d'lsraël au milieu de toi. Tu n'as plus de malheur à craindre. » (So 3,15)

     Yahvé délègue sa royauté à la famille de David; le roi humain devient ainsi le vicaire de Dieu auprès du peuple: « Je le (Salomon) maintiendrai à jamais dans ma maison et dans mon royaume, et son trône sera à jamais affermi. » (1 Ch 17,14) Ainsi se développe un courant de pensée selon lequel le messie, descendant de David, ne sera pas seulement un chef politique, mais aussi un envoyé divin chargé de restaurer la royauté de Dieu dans toute sa plénitude.

Le royaume de Dieu

     C'est en réunissant les éléments de ces diverses tendances et en les enrichissant de l'apport propre de la révélation nouvelle que Jésus peut proclamer : « Le temps est accompli et le Royaume de Dieu est tout proche, repentez-vous et croyez à l'Évangile. » (Mc 1,15) Le thème du Royaume dans le Nouveau Testament, spécialement dans les évangiles synoptiques, occupe une place trop importante pour qu'on puisse songer à le résumer ici en quelques lignes.

Jérôme Longtin

Source : Feuillet biblique 1117 (1984) 5-6.

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Paul misogyne?