Cité du Vatican (Daniel Zbroja / Pexels)

Une évolution

Benoît LambertBenoît Lambert | 27e dimanche du Temps ordinaire (B) – 6 octobre 2024

Mariage et divorce : Marc 10, 2-16
Les lectures : Genèse 2, 18-24 ; Psaume 127 (128) ; Hébreux 2, 9-11
Les citations bibliques sont tirées de la Traduction liturgique officielle.

La majorité des sociétés occidentales actuelles ne partagent pas le doctrine de l’Église catholique sur le mariage. Le divorce est un fait accepté dans plusieurs pays. L’indissolubilité de l’union préconisée par l’Église serait un objectif que plusieurs êtres humains ne peuvent pas atteindre. De plus, la procréation, un des buts essentiels du couple, n’est plus une priorité. Des moyens de contraception développés par les scientifiques permettent d’avoir une relation sexuelle sans crainte de faire un enfant. L’épanouissement personnel des partenaires est devenu la valeur primordiale des hommes et des femmes. Face à ce point de vue, l’Église catholique répond avec la révélation de son fondateur : Jésus Christ. La sexualité humaine doit être encadrée par le mariage, l’union indissoluble d’un homme et d’une femme. Cependant, le pape Pie XII a réitéré que l’aspect relationnel du rapport érotique était aussi un objectif marquant. Le magistère a même autorisé les moyens de contraception basés sur le rythme naturel du système reproductif de la femme. Cette doctrine ne s’est pas élaborée brusquement. Elle a évolué dans le temps. Elle a un début, un milieu et une conclusion.

Le début

La Bible commence avec la création de l’univers. Plusieurs chrétiens et chrétiennes croient que ce récit est historique. L’exégèse catholique considère plutôt les récits de la Genèse comme des textes allégoriques. Ils révèlent, à travers une narration symbolique, des messages essentiels sur la condition humaine. D’abord, YHWH a créé le monde. Celui-ci n’est pas la conséquence du hasard. En deuxième lieu, Dieu a modelé l’humanité à son image. Comme le Père et le Fils sont unis par l’amour de l’Esprit, l’humanité est aussi relationnelle. Elle a été divisée en deux sexes qui s’uniront dans l’amour conjugal. La reproduction humaine reposera sur la rencontre des deux conjoints dans le contact charnel. En troisième lieu, Dieu confie la gestion de la terre à l’humanité. Et ce fait est illustré par l’épisode où Adam nomme les animaux, les plantes et les minéraux qui composent l’environnement terrestre. En effet, les Israélites croyaient qu’un certain pouvoir était donné à celui ou celle qui qualifiait initialement une réalité. Présentement, il faut constater que cette gestion n’a pas été adéquate. L’humanité a abusé de la nature. Les conséquences de ces abus (pollution, réchauffement climatique) menacent actuellement la survie de la race humaine. Une pensée écologique s’est développée dans le catholicisme. Elle préconise le respect des limites de la nature, de gérer avec moins d’avidité ses ressources. Enfin, Dieu veut que nous grandissions. Il veut que nous dépassions le stade infantile de notre développement personnel. Il ne souhaite pas que nous restions sous l’autorité parentale toute notre existence. La personne doit devenir un adulte, se marier et avoir des enfants.

L’Ancienne Alliance

L’Ancienne Alliance est basée sur la Loi révélée par YHWH au peuple élu. Dans le texte de cette Loi, des prescriptions sont fixées pour le mariage (Deutéronome 24,1-2). Le mariage est l’union d’un homme et d’une femme. Ce partenariat peut être brisé par le mari et celui-ci doit produire un acte de répudiation pour l’épouse répudiée. Cet acte permet à l’épouse de se remarier et de ne pas se retrouver à la rue. Malgré le côté patriarcal de cette règle divine, il faut remarquer le souci que Dieu a des femmes puisqu’elles sont protégées contre l’arbitraire masculin car l’époux a l’obligation de donner un acte de répudiation à sa femme. Jésus va remettre les pendules à l’heure en expliquant pourquoi la divinité a autorisé le divorce dans la Loi.
    

La Nouvelle Alliance

Dans l’Évangile, Jésus révèle aux pharisiens que YHWH a consenti à la dissolution des mariages dans le passé à cause de l’endurcissement du cœur d’Israël. En effet, Dieu a toujours voulu que les époux ne se séparent pas. Mais Dieu a reconnu que les fils et les filles d’Abraham n’avaient pas respecté les préceptes communiqués à Moïse. La nation sainte n’avait pas reçu l’Esprit qui permet de se conformer à la volonté divine. Au lieu de s’épanouir sous le régime de la Loi, les multiples règles du Deutéronome et du Lévitique sont devenues un carcan, une prison qui empêchait les gens d’atteindre la perfection. Comme le souligne l’auteur de la lettre aux Hébreux (deuxième lecture), Jésus va fonder un nouveau partenariat entre la Trinité et l’humanité. En mourant sur la croix, Jésus a accompli le dessein de son Père de s’unir aux hommes et aux femmes. Désormais, l’humanité et la divinité se côtoient dans la personne du Seigneur. Le Christ a dorénavant le pouvoir de transmettre l’Esprit d’amour aux gens de bonne volonté. Grâce à lui, les cœurs endurcis des époux peuvent devenir des cœurs charitables et leur relation a maintenant la possibilité de devenir indissoluble.
 
Dans l’extrait de Marc proclamé durant cette célébration, Jésus est très rigoureux. Aucune exception n’existe pour séparer ce que Dieu a uni. Le catholicisme adopte cette position. Cependant, le texte sur le mariage dans l’Évangile de Matthieu (19,9) mentionne une exception qui permet la séparation d’un couple, soit l’union illégitime. Les exégètes ont tenté de définir cette expression. Au fil du temps, ils ont donné trois significations à ce terme : l’adultère, le mariage consanguin et la prostitution d’un des conjoints. L’Orthodoxie et certaines confessions protestantes ont accepté le divorce sur la base de cette exception mentionnée par Matthieu.

Plusieurs diront que le catholicisme autorise le divorce. Dans le langage populaire, les gens appellent cette procédure : le « divorce de Rome ». Cette interprétation est fausse. Le Magistère déclare plutôt la « nullité de mariage », considérant après enquête que des causes antérieures au mariage le rendaient non valide. Quelques raisons (Code de droit canonique, can. 1082-1123) peuvent être évoqués pour démontrer qu’un partenaire ne disposait pas de toutes les informations sur son conjoint afin de donner un consentement éclairé à son engagement nuptial.

Dans les décennies récentes, plusieurs catholiques ont montré du doigt la sévérité du Magistère envers les divorcés remariés. Ceux-ci ne pouvaient pas communier au Corps du Christ. Le pape François a émis la possibilité, pour les divorcés remariés, de participer à l’Eucharistie. Certains catholiques ont été choqués par cette déclaration du pape actuel qui contrevient à la tradition catholique. Selon eux, les divorcés remariés ne font plus partie de la communion catholique puisqu’ils sont des adultères qui n’ont pas respecté les exigences exprimées dans la Bonne Nouvelle de ne pas séparer ce que Dieu avait uni. Mais le pape actuel, depuis son élection, a toujours eu un souci pastoral marqués pour les croyants et les croyantes écartés de la communauté ecclésiale. Au lieu de voir la participation à l’Eucharistie comme un privilège pour les enfants de Dieu qui ont une conscience sans tache, le souverain pontife considère plutôt ce sacrement comme une opportunité qui peut soutenir les pécheurs dans leur périple terrestre vers le paradis. La rencontre avec Jésus-Hostie peut les amener à se convertir. Ainsi, ils deviendront des fils et des filles du Père et seront invités à la table de la Trinité.

Détenteur d’une maîtrise ès arts (théologie) de l’Université Laval, Benoît Lambert a rédigé des articles et des brochures pour plusieurs revues religieuses (Vie liturgique, Revue Notre-Dame-du-Cap). Il collabore au Feuillet biblique depuis 1995.

Source : Le Feuillet biblique, no 2859. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l’autorisation du Diocèse de Montréal.

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