
Le tombeau ouvert. © George Richardson, 2011. Acrylique sur toile, 48 x 24 po (courtoisie de l’artiste).
Il vit et il crut
Lorraine Caza | résurrection du Seigneur (C) – 20 avril 2025
Le tombeau vide : Jean 20, 1-10, évangile de la messe du jour de Pâques
Les lectures : Actes 10, 34a.37-43 ; Psaume 117 (118) ; au choix Colossiens 3, 1-4 ou 1 Corinthiens 5, 6b-8
Les citations bibliques sont tirées de la Traduction liturgique officielle.
L’année jubilaire 2025 nous convie tous et toutes à nous inscrire dans l’immense pèlerinage de l’espérance. À vrai dire, c’est toute la liturgie de notre Église qui est école d’espérance et la solennité de Pâques, la solennité des solennités, en est le sommet. Comme à chaque année, nous avons vécu le Triduum pascal, en poursuivant notre approfondissement de la Passion, de la mort et de l’ensevelissement de Jésus.
Aujourd’hui, c’est l’incroyable victoire de la vie sur la mort, la Résurrection de Jésus. Au cœur de la célébration de ce dimanche, nous reprendrons le récit qui ouvre le chapitre 20 de l’évangile de Jean. Les quatre évangiles canoniques consacrent leur dernière section à évoquer la résurrection de Jésus, mais il faut reconnaître que Jean a eu sa façon bien spéciale de le faire.
Le début du chapitre nous met en présence de Marie de Magdala. Elle se rend au tombeau de grand matin, le premier jour de la semaine. Ce sont encore les ténèbres. Son observation : la pierre a été enlevée du tombeau. Elle court annoncer la chose à Simon-Pierre et à l’autre disciple, celui que Jésus aimait, précise-t-on. « On a enlevé le Seigneur de son tombeau et nous ne savons pas où on l’a déposé. » L’originalité de Jean, c’est de ne nommer que Marie de Magdala, du groupe des femmes qui avaient accompagné Jésus, et de lui donner une grande importance dans la suite du chapitre.
La présence des femmes au tombeau
Il m’a semblé utile de noter comment les autres évangiles avaient signalé la présence des femmes, après la mort de Jésus. Matthieu raconte : Après le jour du sabbat, comme le premier jour de la semaine commençait à poindre, Marie de Magdala et l’autre Marie viennent visiter le tombeau (Mt 28,1). Dans le cadre d’un grand tremblement de terre, l’ange du Seigneur révèle aux femmes ce qu’il est advenu à Jésus et il leur donne une mission auprès des disciples. De ces femmes, le texte dit qu’elles étaient toutes émues et pleines de joie en portant la nouvelle aux disciples. Cet évangéliste ajoute que Jésus ressuscité apparaît aux femmes en chemin vers les disciples.
Pour Marc : Quand le sabbat fut passé, Marie de Magdala, Marie, mère de Jacques et Salomé achètent des aromates pour aller oindre le corps. Et, de grand matin, le premier jour de la semaine, elles vont à la tombe, le soleil s’étant levé. Elles se disaient entre elles : « Qui nous roulera la pierre de la porte du tombeau ? » (Mc 16,1-3). Elles entrent dans le tombeau où un jeune homme leur dit ce qui est arrivé à Jésus et leur confie une mission auprès des disciples et de Pierre. La réaction des femmes : elles sortent et s’enfuient du tombeau parce qu’elles sont toutes tremblantes et hors d’elles-mêmes. Elles ne disent rien à personne et elles ont peur. Il est intéressant de remarquer que, dans la finale qui a été ajoutée à l’évangile de Marc, l’apparition à Marie de Magdala est rappelée.
Quant à Luc, voici ce qu’il nous a laissé : Le premier jour de la semaine, à la pointe de l’aurore, les femmes allèrent à la tombe avec les aromates qu’elles avaient préparées. Elles trouvèrent la pierre roulée de devant le tombeau, mais étant entrées, elles ne trouvèrent pas le corps du Seigneur (Lc 24,1-3). Mais qui sont ces femmes qui vont au tombeau? Luc dit que ce sont les femmes qui l’accompagnaient depuis la Galilée (Lc 23,49.55). En 24,10, lorsque Luc rapporte comment les femmes ont livré ce que les deux hommes en habits éblouissants leur avaient dit au tombeau, il dit qu’il s’agit de Marie de Magdala, de Jeanne et de Marie, mère de Jacques et d’autres femmes…
Marie de Magdala, Simon-Pierre et l’autre disciple
Les quatre évangiles canoniques ont signalé la présence engagée de femmes autour de la mort et de l’ensevelissement de Jésus. Certains noms reviennent, mais celui qui est en tête de toutes les listes, c’est celui de Marie de Magdala. Elle a dû jouer un rôle très important dans la première communauté. Par la Magdaléenne, Jean nous introduit auprès de Simon-Pierre et de l’autre disciple. Le texte donne la priorité à Simon-Pierre, mais le fait avec une grande délicatesse. Le disciple que Jésus aimait arrive le premier au tombeau, mais il attend que Simon-Pierre entre pour y pénétrer à son tour. Par ailleurs, c’est au sujet de l’autre disciple qu’il sera dit : Il vit et il crut. Alors seulement, nous dit Jean, les disciples comprirent que, selon les Écritures, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts.
Ne manquons pas de noter que le terme tombeau apparaît six fois dans ces neuf versets. Façon très simple d’exprimer vigoureusement que Jésus est vraiment mort.
De Marie de Magdala, on précise qu’elle court annoncer aux disciples ce qu’elle a vu ; on ajoute aussi que Simon-Pierre et l’autre disciple, alertés par la femme, courent ensemble au tombeau. La course dit l’empressement à vouloir comprendre la réalité si mystérieuse dans laquelle les disciples sont plongés. Autre trait particulier à ce récit, l’importance donnée aux linges qui enveloppaient le corps de Jésus et au linceul. Si quelqu’un avait dérobé le corps, aurait-il pris le temps de bien placer ces linges, ce linceul ? Ce détail ne prouve-t-il pas que l’hypothèse du corps enlevé, lancée par la Magdaléenne, ne tient pas. Ce texte de Jean 20,1-9, nous le voyons, est d’une grande richesse. Il faut le scruter, le méditer et lui permettre de nous indiquer un merveilleux chemin de contemplation.
En première lecture de la liturgie de ce dimanche, nous ouvrons le chapitre 10 des Actes des Apôtres. Les envoyés de Corneille, centurion de la cohorte italique, établi à Césarée, sont autorisés par leur maître à demander à Pierre de les suivre. Chez Corneille, à Joppé, Pierre prêche à la famille de Corneille et à ses amis, leur annonçant Jésus Christ. Là où il passait, il faisait le bien et il guérissait tous ceux qui étaient sous le pouvoir du diable, car Dieu était avec lui. Et nous, nous sommes témoins de tout ce qu’il (Jésus) a fait dans le pays des Juifs et à Jérusalem. Celui qu’ils ont supprimé en le suspendant au bois du supplice, Dieu l’a ressuscité le troisième jour…
La seconde lecture, tirée de la Lettre aux Colossiens, nous stimule à ne pas perdre de vue le lien entre la Résurrection de Jésus que nous célébrons en ce jour de Pâques et notre propre résurrection. Que ferons-nous pour vivre en conformité avec la résurrection qui nous est promise? Si vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités d’en-haut… Quand paraîtra le Christ, votre vie, alors, vous aussi, vous paraîtrez avec lui dans la gloire.
Quand il se trouva devant le tombeau vide, le disciple que Jésus aimait vit et cru. En cette année de pèlerinage de l’espérance, que voyons-nous? Que croyons-nous? Ce temps pascal sera–t-il pour nous un temps privilégié d’approfondissement de notre foi en la Résurrection du Christ? Nous renverra-t-il à notre foi, bien ancrée dans notre expérience quotidienne, que des pousses de vie nouvelle doivent être découvertes et cultivées aux lieux mêmes de nos morts, de nos échecs, de nos limites, de nos fragilités?
Membre de la Congrégation de Notre-Dame, Lorraine Caza est bibliste et professeure honoraire du Collège dominicain de philosophie et de théologie (Ottawa).
Source : Le Feuillet biblique, no 2887. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l’autorisation du Diocèse de Montréal.
