(Aaron Burden / Unsplash)

Porter le kérygme dans le corps

Hélène PinardHélène Pinard | 8 septembre 2025

L’anamnèse que nous proclamons à chaque eucharistie fait partie des textes les plus anciens du Nouveau Testament. Déjà, saint Paul, dans la première épître aux Corinthiens (15,3-4), rappelle ce qu’il a entendu : « Avant tout, je vous ai transmis ceci, que j’ai moi-même reçu... »

Christ est mort pour nos péchés, selon les Écritures
Il a été enseveli,
Il est ressuscité le troisième jour selon les Écritures.
(trad. Louise Bisson, 2013)

Voilà le kérygme, la base de la foi chrétienne. C’est l’assise sur laquelle repose notre relation avec le Christ, avec le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, le Dieu des promesses. Inutile de vouloir catéchiser si cette relation n’est pas enracinée dans une expérience personnelle [1].

Annoncer la Bonne Nouvelle

Aujourd’hui, la parole est souvent suspecte. Crois-tu ce que tu dis? En récitatif biblique, la Parole prend chair dans le corps, dans nos vies. La Parole imprimée dans le corps rejoue souvent sans effort, à l’endroit et au moment que l’on ne prévoit pas. Il est important de s’arrêter et de prendre le temps de recevoir ce qui rejoue. L’entendre peut ouvrir un nouveau chemin.

Alors, en apprenant ce kérygme par cœur, par le cœur, on peut s’attendre à ce que le témoignage surgisse spontanément. C’est ainsi que Pierre invite « à rendre compte de l’espérance qui nous habite » (1 P 3,15).

Selon les Écritures

Dans deux versets, Paul reprend deux fois l’expression : « selon les Écritures ». On sait que Paul a été formé par un scribe et qu’il connaît bien ce que nous appelons l’Ancien Testament. Peut-on retrouver à quoi il fait allusion quand il utilise cette expression?

En réalité, on ne trouve nulle part dans les Écritures des affirmations concernant explicitement la mort et la résurrection du Messie : la formule « conformément aux Écritures » ne signifie pas que tout était écrit d’avance : la formule « selon les Écritures » signifie que tout ce qui est arrivé est conforme au dessein bienveillant de Dieu ; on pourrait remplacer ici le mot « Écritures » par le mot « projet de Dieu » ou « promesse de Dieu » [2].

De fait, dans l’Ancien Testament, maints passages proclament que Dieu vient sauver son peuple, il lui promet la vie. Dieu pardonne les péchés du peuple. C’est bien ce que proclame le kérygme : Christ est mort pour nos péchés… ils sont effacés. Christ est ressuscité : la mort est vaincue. Malgré nos lenteurs et nos faiblesses, cette Bonne Nouvelle suscite l’espérance.

Le troisième jour

L’expression « le troisième jour » se retrouve à plusieurs endroits dans les Écritures :

  • Le troisième jour, au mont Moryyah, Dieu ouvre les yeux d’Abraham qui offrira un bélier et sauvera ainsi Isaac, le fils de la promesse (Gn 22,4) ;
  • Le troisième jour, Joseph, en Égypte, avait rendu la liberté à ses frères (Gn 42,18) ;
  • Le troisième jour, le Seigneur s’était manifesté à son peuple réuni au pied du mont Sinaï (Ex 19,11.16) ;
  • Le troisième jour, Jonas accueille sa mission et se retrouve sur la terre ferme après son séjour dans le poisson (Jon 2,1)
  • Venez, retournons au Seigneur ! Car il a déchiré, mais il nous guérira ; Il a frappé, mais il bandera nos plaies. Il nous rendra la vie dans deux jours ; Le troisième jour il nous relèvera, et nous vivrons devant lui (Os 6,1-2). 

L’expression le troisième jour ne signifie pas entre 48 et 72 heures. Elle révèle plutôt que le salut promis par Dieu et la vie en abondance survient après une situation de mort. Cependant, Dieu laisse l’être humain libre : choisis la vie afin de vivre (Dt 30,19).

Cherchons à connaître le Seigneur et annonçons-le

Osée 6,3 rappelle l’attitude à adopter face à cette promesse inouïe : Connaissons, cherchons à connaître le Seigneur ; Sa venue est aussi certaine que celle de l’aurore. Il viendra pour nous comme la pluie, comme la pluie du printemps qui arrose la terre. (Os 6,3).

On peut entendre cette même assurance et ce même appel en 1 Co 15,1-2 :

« Je vous rappelle la Bonne Nouvelle que je vous ai annoncée ; cet Évangile, vous l’avez reçu, et vous y restez attachés ; vous serez sauvés par lui si vous le gardez tel que je vous l’ai annoncé ; autrement, c’est pour rien que vous êtes devenus croyants ».

À travers le récitatif biblique, nous cherchons à connaître le Seigneur et à nourrir la relation née de l’impression de la Parole dans notre corps. Cela conduit certainement à une rencontre personnelle de communion et d’amour. Le témoignage de l’espérance qui nous habite rejaillit autour de nous et rappelle la fidélité de Dieu qui accomplit toujours sa promesse lorsqu’on s’ouvre à son amour.

Hélène Pinard, FCSCJ, est bibliste et transmetteure de l’Association canadienne du récitatif biblique.

[1] Voir l’art. « Kérygme » sur Youcat.
[2] Marie Noelle Thabut, commentaire de 1 Cor 15,1-11, Année C, Temps ordinaire, 5ième dimanche.

Jousse

Récitatif biblique

L'Association canadienne du récitatif biblique propose une chronique mensuelle pour comprendre la discipline spirituelle qui rassemble ses membres. Axée sur la Parole et sur son effet sur l'ensemble de la personne, le récitatif biblique est une forme de méditation où tous les sens sont sollicités.