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chronique du 30 octobre 2017

 

Avec le Christ au bord du lac

Vue depuis la côte nord ouest du lac.

Vue depuis la côte nord ouest du lac.


Pour ceux et celles qui peuvent inscrire dans leur pèlerinage une promenade sur le lac de Tibériade, c’est une belle occasion de lire un grand nombre d’épisodes de la vie de Jésus et des apôtres in situ.

Le lac est installé dans le Ghor, la dépression formée par la faille d’écartement entre la plaque arabique et la plaque africaine. De 21 km du nord au sud, de 12 km au plus large d’est en ouest, il n’est profond que de 50 m, mais à 212 m au-dessous du niveau de la mer. Son niveau baisse régulièrement, comme celui de la mer Morte plus au sud, car l’alimentation en eau se raréfie, tant son apport principal, le Jourdain, est pompé en amont par la Jordanie et Israël. Plusieurs ruisseaux déversent des montagnes qui l’entourent quelques mètres cubes et des sources chaudes souterraines contribuent aussi à son approvisionnement. Il est ceint de hauteurs, à l’est le plateau du Golan, à l’ouest les collines de Hattin et la vallée de l’Arbel avec un escarpement rocheux, au nord les montagnes de Galilée qui montent jusqu’à l’Hermon à 2814 m d’où dévale précisément le Jourdain. Seule la sortie du fleuve au sud s’ouvre sur une plaine, Yizréel, nom qui signifie l’ensemencée.

Le lac vu depuis le mont Arbel sur la rive ouest.

Le lac vu depuis le mont Arbel sur la rive ouest.

Au fil des pages de l’Ancien et du Nouveau Testaments divers noms sont donnés au lac : de Kinneret, en Nb 34,11 et Jos 13,27, selon la forme qu’avaient repérée les Anciens : en effet depuis les hauteurs qui dominent le lac on voit bien la pointe rétrécie au sud et l’élargissement au nord qui forment comme un kinnor, une lyre ; de Gennessar 1 M 11,67 ; de Gennesareth Lc 5,1-11 ; ces deux dernières dénominations étant une déformation de Kinneret. De Galilée dans les trois autres évangiles Mt 4,18-22, Mc 1,16-20, Jn 6,1 [1]. Disciples, pêcheurs, apôtres, auditeurs de Jésus, ils ont connu un lac plus bas, des vestiges de ports et de villages l’attestent, qui ont été repérés sous l’eau à Magdala comme à Kursi. Et une végétation bien différente : aux seuls oliviers, figuiers, dattiers et pieds de vigne de l’époque se sont ajoutés avocatiers, manguiers, plusieurs variétés d’agrumes et plants de coton.

Plan du lac et de ses environs

Les sites auxquels s’attacheront les pèlerins sont nombreux et uniquement dans la partie nord : Magdala, encore en cours de fouilles, mais déjà accessible, d’où est originaire la Magdeleine; Tabgha où est commémorée la multiplication des pains; plein nord, les ruines de Capharnaüm abritant les restes de la maison de Pierre à côté de la synagogue de la ville; Bethsaïde en arrière sur une hauteur, la ville d’origine de Philippe, Pierre et André (Jn 1,44) ; Kursi à l’est, au pied du Golan, où l’on raconte l’épisode des démoniaques guéris au détriment des porcs engloutis. Toutes ces scènes de la vie galiléenne de Jésus sont à relire et méditer en chaque lieu et le pèlerin les connaît bien.

Capharnaüm : le village de Pierre et la synagogue où prêcha Jésus.

Capharnaüm : le village de Pierre et la synagogue où prêcha Jésus.

Le lieu de l’appel

Le lac lui-même tient une bonne place dans la vie de Jésus et des Douze. Pour eux au premier chef, car quelques-uns étaient des pêcheurs. Et l’on pourra évoquer les scènes d’appel.

Comme il cheminait sur le bord de la mer de Galilée, il vit deux frères, Simon appelé Pierre et André son frère, qui jetaient l’épervier dans la mer, car c’étaient des pêcheurs. Et il leur dit « Venez à ma suite et je vous ferai pêcheurs d’hommes. » Eux, aussitôt laissant les filets, le suivirent. (Mt 4,18-20)

Autrement raconté par Luc puisque, selon lui, Jésus et Pierre se connaissent déjà et c’est en écoutant le maître parler aux foules depuis sa barque, parole appuyée d’une pêche étonnamment abondante, que Pierre se décide à l’accompagner. (Lc 5,1-17) « Pêcheurs d’hommes » n’a peut-être pas paru si étrange à ces familiers de l’Écriture. Le prophète Jérémie au VIIe siècle avait utilisé l’image pour dire le désir de Dieu que son peuple, alors dispersé, soit rassemblé comme des poissons dans un même filet : « Je les ramènerai sur la terre que j’avais donnée à leurs pères. Je vais envoyer quantité de pêcheurs qui les pêcheront. » (Jr 16,15-16)

L’Anastasis

Barque du premier siècle exposée à proximité du lac.

On peut choisir son parcours, rejoindre Ein Guev, depuis la ville de Tibériade ou le môle de Capharnaüm, naviguer entre les deux kibboutz de Ein Guev et Ginnosar; celui-ci, côte ouest, expose une barque du Ier siècle en bois de cèdre et de cyprès, longue de 8,9 m. Elle a été retrouvée au fond de l’eau puis restaurée et présente aux visiteurs le type de bateau utilisé à l’époque de Jésus pour la pêche ou le transport. En fonction de son itinéraire terrestre, l’autobus faisant le trajet pour récupérer ses pèlerins, tout est possible. Mais à chaque parcours, au milieu du bleu du lac, on demande un arrêt des machines, et dans le silence, on parcourt des pages d’évangile. Des histoires de filets où l’on comprend que l’essentiel est de ramasser du monde pour proclamer la Bonne nouvelle. L’idéal de Dieu, c’est que le filet soit plein de bonnes prises (voir Mt 13,47).

Bateau pour pèlerin

Bateau pour pèlerin

D’une rive à l’autre

La tempête apaisée est racontée par les trois synoptiques. On choisira de la lire chez Marc qui donne des détails touchants : Jésus était à la poupe dormant sur le coussin (Mc 4,35-41). C’est encore le début de la prédication, mais déjà l’on se demande : « Qui est-il donc celui-là? De sa parole il domine les éléments. » Peu après, ayant abordé au pays des Géraséniens, il va faire rejoindre les animaux impurs dans les flots, noyant d’un même coup les démons affolés et l’impureté (Mc 5,1-20). Schéma inverse de la création, où des eaux initiales étaient sortis la terre ferme, le monde animal, et enfin l’homme. C’est un beau moment de lire au milieu du lac ce questionnement auquel ne peut répondre que l’identité entièrement reconnue du Ressuscité qui vient à la fois rétablir toutes choses et instaurer du neuf… Ne le voyez-vous pas? (voir Is 43,19)

C’est le même Christ Ressuscité qui marche sur les eaux, quand dans l’imaginaire de l’Antiquité, et tout particulièrement chez les juifs, elles symbolisent la mort que lui a vaincue, engloutie pour toujours dans le tombeau (Mc 6,45-52). Mettre en comparaison les pêches de Pierre au début de l’évangile de Luc (chapitre 5) et en finale de Jean (chapitre 21) est éclairant; c’est toujours la profusion, mais dans des circonstances différentes qui permettent au lecteur de reconnaître en Jésus le Seigneur.

Scènes de pêche et d’abondance, appel de plusieurs disciples, miracles accomplis de domination de la mer, de guérisons des corps et des esprits et de confirmation de la foi... Les eaux calmes et bleues du lac, ses tempêtes grises et ses remous, nous interrogent sur notre vocation, notre désir de rencontrer le Seigneur, notre mission d’apôtre. N’hésitons pas à tenter l’expérience, montons dans la barque, allons au large et laissons-nous séduire par la parole du Christ dans le silence.

Vue sur le lac

Les filets de Matthieu

En plus du terme générique, chez Matthieu sont donnés trois filets différents :

4,20-21 : laissant leurs filets ils le suivirent ; terme général pour les filets que Jacques et Jean sont en train de nettoyer et ravauder.

4,18 : ils jetaient l’épervier, filet de 6 m de diamètre qu’on lance debout sur le fond ou depuis la barque et qu’on laisse s’enfoncer ; un des pêcheurs plonge nu dessous pour le fermer et le ramène ; aussi en Jn 21,17.

13,47 : le Royaume des cieux est semblable à une seine qu’on jette en mer et qui ramène toutes sortes de choses ; la seine, le plus grand filet qui mesurait 400 x 4 m, équipé de cordes et flotteurs aux deux extrémités ; une équipe tient le filet sur le rivage, une autre dans le bateau lui fait décrire un demi-cercle sous l’eau ; quand le filet est rempli les deux équipes prennent les cordes et se rejoignent pour former un sac qu’on ramène au rivage.

On le voit ces manières de pêcher restent proches du rivage, on s’aventure rarement au large !

Un toisième filet existe aussi, le trémail : triple filet en trois nappes superposées (deux à mailles larges et une au milieu à mailles plus fines) qui forment une nasse ; après ramassage il faut nettoyer et réinstaller. Est-ce celui utilisé en Mt 4,21 ?

[1] N.D.L.R. À l’époque romaine, le plan d’eau est aussi appelé mer de Tibériade (Jn 21,1) en l’honneur de l’empereur Tibère.

Source : Terre Sainte magazine 646 (2016) 6-11 (reproduit avec autorisation).

Claire Burkel

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Jérusalem à l’échelle du temps

 

 

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